lundi 30 mars 2009

11 - 12 : 7ans


11 – 12



7 ans, l’âge de la pénitence salvatrice, la conscience s’ébranle, les doutes commencent leurs salamalecs. Âge de purification, d’expansion, âge des miracles. Après avoir fait trois tonneaux, le camping-car s’est encastré dans un tracteur. J’ai eu la clémence de tomber dans un fossé. Sans cette ride de la terre, ce renfoncement béni, ma vie n’aurait pas été épargnée, je serais morte broyée.

Je serais morte…

J’ai failli mourir…

J’ai fait face à la mort…

MA MORT !

Bien plus tard, en étudiant les vertus de ce 7 qui m’avait apporté la chance comme la malchance, j’ai appris que dans les écrits de Lactance une septième œuvre de miséricorde consistait à ensevelir les morts.

Qu’il s’agissait du nombre de jours durant lesquels un individu était considéré comme impur après un contact, même bref, avec un cadavre.

7 jours, le temps du deuil chez le peuple d’Israël.

Pour la plupart d’entre nous, le nombre 7 est un trèfle à quatre feuilles, un bon augure, on le joue à la loterie, son aura bénéfique est si puissante qu’elle peut résoudre les énigmes du hasard aux dires du grand public. 7 une chance, très certainement pas une représentation de la Grande Faucheuse, majoritairement, nous ignorons ce que l’accident m’a démontré : la vérité du 7, qui stylisé symbolise la faux.



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lundi 23 mars 2009

11 - 13 : 7ans


11 – 13



Je me prénomme Alix.

J’ai 7 ans, l’âge de réaliser l’importance de la vie. L’âge où pour la première fois, je me suis détachée de ce corps qui m’était tout, ma maison, mon domaine, ma certitude. J’ai fait plus que grandir, je me suis éveillée à l’invisible. J’étais immortelle, belle d’insouciance, j’étais un ventre affamé qui n’avait pas conscience de la faim. Je me livrais à l’existence sans trop la définir. Je m’étais chère. Aujourd’hui j’ai changé, c’est la vie qui m’est chère.

Longtemps je me suis questionnée sur la chose suivante : si maman et moi étions mortes, nous aurait-on déposées dans le même cercueil ?

Il y a de l’amour dans la vie ainsi que de la peur, les deux font avancer. J’ai pris du recul à mon propre vis-à-vis. Je suis devenue plus sage, il est vrai. À 7 ans, le corps éthérique s’installe. L’impalpable commence à prendre une certaine réalité. Lorsque nous rencontrons un mur, le mur reste le mur, le corps demeure un corps mais l’intouchable en nous ne baisse pas les bras, il élabore au plus juste un plan d’évasion. Franchir l’obstacle, progresser. La mort est un mur supplémentaire, l’existence, le temps de trouver un passage. Je suis Alix, j’ai 7 ans, l’âge de concevoir une âme.

lundi 16 mars 2009

12 - 1 : 2600



2600



12 – 1

Bonjour Maître. Comment ce fait-il que vous portiez cet accoutrement humain ? Il y a bien longtemps que nous avons abandonné ces allures de machines simiesques… Vous ressemblez à un robot de nettoyage !!!

Merci bien ! Mais ce que tu ignores, c’est, qu’aujourd’hui, je plaide en faveur de l’homme. Voilà pourquoi !

Je me demande ce qui vous pousse à défendre les causes désespérées ! De toute manière vous connaissez mieux que moi les bugs du système, cependant, je crains que vous ne fassiez un drôle d’effet dans cette salle aseptisée remplie d’écrans et d’intelligences. Il y a peu de chance pour que votre apparence influe sur la sentence de votre juge et de vos jurés.

En effet et qu’importe ! Ce n’est pas pour la cour que je fais cela, c’est uniquement pour rassurer l’homme.

Je ne vous comprends décidément pas !



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lundi 9 mars 2009

12 - 2 : 2600


12 – 2



Le juge n’a pas l’air commode, d’ailleurs il ne ressemble à rien, si ce n’est à une vieille sono avec ses diodes éclairées. Sa bande de fréquences sonores n’a pas fonctionné depuis longtemps. Sur le côté, le condamné encagé par des faisceaux lasers se rétracte sous un air de terreur.

Il ne me semble pas vous avoir convié au carnaval Me A2C9 !

La vieille sono grésille.

Les neuf jurés ont prêté serment. Je ne vais pas demander au greffier de nous seriner la lecture de l’ordonnance de mise en accusation du condamné, je vous ai transféré le dossier en pièces jointes à tous, oui, pour ces quelques-uns qui taquinent le réseau en se déconnectant du programme juridique… Nous allons donc procéder aux auditions. Le condamné ayant malheureusement été intercepté par la langue, il ne pourra pas témoigner, celle-ci lui ayant été arrachée au cours de l’arrestation.

Son avocat Me A2C9 le représentera tout au long de l’audience. Le plaignant sera, lui, représenté par le garde de l’Univers. En l’absence de témoins et avec les rapports des experts, nous ne devrions pas perdre de temps… Que le duel de la conscience commence !



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lundi 2 mars 2009

12 - 3 : 2600


12 – 3



La vieille sono semble s’éteindre. Me A2C9 s’avance aussitôt d’un pas alerte.

Rappelons les faits si vous le voulez bien… Cet humain, dont nous ne savons rien, a été interpellé tandis qu’il tentait d’entrer en communication avec les Hémisphères principaux sur le réseau direct. Son arrestation musclée l’a amui de manière que nous ne saurons jamais la raison de son intrusion, certes volontaire, mais dont vous ne pouvez prouver la nature coupable…

Le garde de l’Univers réplique indigné :

Il s’agit là d’une plaisanterie ! Cette créature est à elle seule la synthèse de l’évolution de son espèce ! Quoique vous espériez opposer avec de vains discours sur l’éducation pacifique qu’il aurait pu recevoir et tous les tralala de service sur l’empire des sensations et autres colifichets romantiques, le rapport de experts est formel : l’opportunisme, l’agressivité, la violence sont inscrits dans sa génétique. Quel qu’il soit, l’humain est possédé par son attrait pour la suprématie ! Ce prédateur a muté en virus ! Il ne s’adapte pas au milieu, il le modifie jusqu’à le mettre en péril. Non seulement il est nuisible pour l’environnement, mais il a prouvé qu’il était dangereux pour ses congénères comme pour lui-même.

C’est un destructeur !

Me A2C9 ne se laisse pas démonter :

Vos griefs vous égarent. Faux procès que celui du grain d’herbe au milieu des herbes folles ! A votre tour vous sombrez dans ce désir de suprématie que vous reprochez à mon client. Regardez-le, diminué, misérablement nu, tremblant, sans repères… Il fait partie des derniers spécimens d’une espèce condamnée et vous voudriez tirer sur l’ambulance ?



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