lundi 26 mars 2012

Les clefs : 1 - 5



1 – 5

- « Je ne crois pas que ta nana se sente bien dans l’ambiance… »
- « Tiens chérie, tu vas te boire un petit Cognac avec nous, ça te décoincera un peu ! »
Il lui servit un gobelet rempli jusqu’au col.
- « Et glou ! Et glou ! »
Elle but sans conviction. L’alcool lui brûlait la gorge et l’estomac.
- « Et glou… et glou… »
Elle eut un haut-le-cœur.
- « Je te parie qu’elle n’arrive pas au bout ! »
- « Tu rigoles ou quoi ? Allez, mon cœur, tu vas tout boire, pas vrai ? »

Ils s’excitaient tous les deux en se tapant sur les cuisses, aussi prit-elle sur elle de faire cul sec. L’alcool descendit et remonta. Elle se couvrit la bouche des mains et se précipita s’isoler dans la salle de bain. Elle vomit. Sa tête tournait, ses doigts tremblaient. Elle s’aperçut blême dans l’armoire à pharmacie. Elle se déshabilla et entra dans la douche. L’eau tiède pénétrait doucement sa chevelure, Emma revint à elle. Le savon parfumé rassurait son corps et évadait son odorat. Elle replaçait la tête sous le jet lorsqu’un courant froid l’étreignit. Elle frémit. Il venait d’ouvrir le rideau d’un geste large. Elle poussa un petit cri de surprise.

- « Alors, tu es d’accord ? »
- « Pourquoi ? »
- « Laisse tomber. Tu vas voir. »

Il récupéra les vêtements qu’elle avait posés sur le porte-serviettes et rejoignit la pièce principale. Emma s’essuya et enfila son peignoir blanc en nids d’abeilles. Elle s’apprêtait à filer discrètement dans la chambre afin d’enfiler quelque chose quand Il l’intercepta. L’intensité lumineuse changea. Il restait dans son dos, solidement rivé à ses épaules. Emma sentait son haleine chatouiller sa nuque. Il était brûlant. Elle était glaciale.
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lundi 19 mars 2012

Les clefs : 1 - 6



1 – 6

Il poussa d’une voix rauque :
- « Tu la veux ? Prends-là ! »
Emma eut un mouvement de recul. Il resserra l’étau de ses mains. Le Breton glissa jusqu’à elle sans se lever. Ses yeux n’étaient que deux fentes luisantes. Ses dents pointaient à l’orée de ses lèvres charnues. Elle sursauta violemment dès qu’il commença à l’effleurer. Il frôlait pourtant ses pieds avec délicatesse, il jubilait remontant tel un serpent jusqu’aux chevilles qu’il empoigna avec une force inattendue. Le Breton la dévisageait sans émotion reprenant son ascension, les mollets, les genoux qu’il vint mordiller, l’entrecuisse… Emma, transie jusqu’alors, se mit à hurler et à se débattre impuissante. Le Breton se replia tout de même contre le mur de peur de subir la ruade. Emma se sentait reprendre de la force. Il relâcha sa poigne, elle libéra un bras se retournant pour lui faire face, mais tandis qu’elle achevait son mouvement, Il lui décocha un coup de poing qui l’envoya à terre. Emma était sonnée. Jamais elle n’avait vécu cela. Elle avait toujours été une petite fille sage. Elle avait reçu plus de conseils de ses parents que de réprimandes et encore moins de claques. Elle gisait sur le sol et le fixait avec rage.
- « Ne me regarde pas comme ça ! Baisse les yeux ! »
Elle ne lâcha pas prise. Il fulminait. Elle le provoquait. Il l’insulta et la saisit pour la projeter de toute sa colère contre l’armoire. Le crâne d’Emma vint heurter la porte en bois qui s’entrouvrit à l’instant où elle perdait connaissance.


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lundi 12 mars 2012

Les clefs : 1 - 7


1 – 7

Emma a beaucoup marché, elle n’en peut plus. Elle est même revenue sur ses pas. Elle déambule dans Paris, déconnectée du monde réel. C’est en fantôme qu’elle trouve un coin dans un bar bardé de néons. Elle retire ses chaussures sous la table et commande une boisson chaude et un sandwich. Quelle heure est-il ? L’heure de la présence hypocrite de la lune dans le jour encore vif. L’heure des flash-back, de l’angoissante réalité. Elle pleure. On l’avait bien prévenue. Elle n’avait rien voulu entendre. Elle avait même pensé que le bonheur des uns faisait le malheur des autres. Comment peut-on à ce point ne pas connaître l’être avec lequel on vit ?

Elle aurait préféré ne pas revenir à elle. Ils l’avaient transportée dans la chambre. Sa tête était posée sur l’oreiller, on la prenait calmement. Lorsqu’elle ouvrit les yeux, Il était assis en face et la scrutait. Le Breton intensifia son va-et-vient. Elle voulut réagir mais elle ne le put pas. Elle suffoquait. Le Breton sortait et replongeait en elle avec rudesse. Elle poussa une plainte qui sembla le ravir. L’étranger se la donnait de plus belle. Il les observait en se décomposant, Emma laissait filtrer son image ténue entre ses cils et se mit à gémir. Il pinça les lèvres, l’autre se pondéra la quittant de nouveau. Le Breton se caressait le sexe entre ses fesses, il s’apprêtait à la sodomiser quand Il surgit d’un bond de l’autre extrémité de la pièce le chassant brutalement.
- « Non. Tu n’y as pas droit. Cette partie d’elle n’appartient qu’à moi ! »
L’autre capitula et battit en retraite salement exhibé au fond de la pièce, visqueux et sur sa faim. Emma le vit passer misérablement humain dans sa nudité, elle éprouva la pitié dont il ne faisait pas preuve. La seule chose qui semblait désormais intéresser le Breton était la manière dont Il était censé l’achever. L’homme pensait sans doute se finir en observant la manœuvre. Celui qu’elle aimait lui mit une tape sur le cul.
- « Bouge ! Je t’ai vu te cambrer pour lui, tu peux bien onduler un peu pour ton mec ! »
Emma demeurait statique. Il la frappa plus fort. Elle ne réagissait pas. Le Breton se mit à ricaner. Il tentait de la pénétrer mais il bandait mollement, son sexe pliait et ricochait contre la chair. Il poussa un râle d’exaspération.
- « Tu ne peux pas y mettre du tien ? »
Emma faisait la morte. Il insistait sans y parvenir au point de l’esquinter. Il était mou. Désespérément lâche, le Breton continuait de se moquer. Il se rétracta au bord du lit, sa respiration rythmait ses nerfs, ses poings déchiraient presque les draps. Emma ferma les yeux. Elle écoutait. Il stoppa sa respiration, le Breton avait gloussé de nouveau, une raillerie de trop. Il lui fonça dedans et le traîna sauvagement de l’autre côté de la pièce. Il revint furieux, prit les fripes de l’ironique et lui envoya à la figure.
- « Maintenant tu te casses ! »
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lundi 5 mars 2012

Les clefs : 1 - 8



1 – 8

La porte de la chambre fut refermée dans l’emportement général. Les sons parvenaient étouffés jusqu’à Emma, mais elle entendit le Breton éclater d’un rire complètement cynique. Rien ne semblait pouvoir terrasser ce rire qui retentissait entre les parois vides du couloir. Des bruits de lutte… les éclats de rires se tarirent, on heurta un carton de vaisselle, plus rien. Emma se concentrait. Plus rien. Puis la porte d’entrée s’ouvrit et se referma. Elle s’attendait à voir quelqu’un débarquer mais l’immobilité avait gelé l’appartement. Emma était accablée par une fatigue extrême. Ses membres étaient engourdis.
Elle souffrait sans encore tout réaliser. Quand allait-il se décider à revenir ? Emma se laissait aller, le vide l’envahissait, un de ces néants qui mettent fin aux envies comme aux angoisses. Elle ne sentait pas le fil de salive qui la reliait à la taie d’oreiller, seul cet abattement total qui la rivait à la terre tandis que son esprit souhaitait s’évader. Tandis qu’elle cherchait l’ailleurs, Il revint.
- « Tu dors ? »
Silence. Il s’approcha, la frôla et vint poser quelque chose de froid contre son poignet qui la blessa. Elle ne poussa pas même un soupir. Il souffla. Elle ne donnait aucun signe de vie. Il lui dégagea tendrement une mèche sur le front.
- « Tu dors ? », répéta-t-il avant de planter le couteau dans l’oreiller d’Emma et de quitter l’appartement comme un dément.

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