lundi 6 février 2012

Homicide X : 2 - 1


HOMICIDE X

2 - 1

Une mouche virevolte contre un carreau de l’atelier. Une chaleur moite stagne dans la pièce écrasée de lumière. Un ciel bleu franc laisse filer quelques moutons blancs. Le soleil est partout, victorieux sur l’ombre. Le bourdonnement incessant d’un insecte fait ciller Samuel nerveusement. Il est assis dans son fauteuil américain en cuir fauve et fait face au chevalet sans pour autant contempler la toile encore luisante et poisseuse. Il semble éreinté et ne cesse de se repasser son mouchoir sur le front et sous le nez. Il perle aussitôt. Il voudrait retirer sa peau, l’accrocher là, au portemanteau acajou et redécouvrir la fraîcheur d’un patio verdoyant et malheureusement imaginaire. La mouche insiste en se cognant contre la vitre dans le dessein évident de percer le ciel. Elle irrite Samuel quant à son incapacité à y parvenir. En ce moment précis, l’été n’est rien. La chaleur écrasante n’est rien. Il n’existe que cet insecte perturbant et cette odeur. Odeur omniprésente désormais. Odeur accusatrice. L’odeur noire. Cet arôme âcre de la mort qui, subrepticement, commence à prendre le dessus sur l’essence de térébenthine. Samuel s’éponge à nouveau le front, la lèvre, les coins de la bouche. Il est abattu. Il ne sait plus quoi faire. Il se lève. Il se rassied. Il serre son mouchoir dans son poing. Ce n’est pas qu’il soit réellement peiné, ce qui l’angoisse, c’est l’organisation, le déroulement de la manœuvre, le timing. L’insecte s’entête absurdement. Samuel se dresse, va jusqu’à la baie vitrée. Il patiente en regardant la rue en contre-plongée puis, d’un coup, il saisit la mouche pour l’écraser dans sa paume. Cela suffisait !


(…/…)

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