lundi 2 avril 2012

Les clefs : 1 - 4


1 – 4

Ils avaient passé une excellente journée. Le soleil aspergeait le lit, ses rayons rigides donnaient corps à la poussière en suspend. Il était calme. Il lui caressait les cheveux en chantonnant. Elle se reposait détendue contre son épaule. Le monde était absent. Le téléphone n’existait pas. Il n’y avait qu’eux dans leur bulle d’amour opaque. Elle était bien mais le crépuscule a brouillé l’atmosphère. Il a voulu sortir, aller prendre l’air, alors ils sont sortis sous le ciel griffé de violet. Il la maintenait solidement contre lui. Elle se sentait protégée. Ils se dirigeaient gentiment vers la gare de Lyon lorsqu’ils ont rencontré le Breton. Jamais il n’aurait fallu croiser ce type-là ! Dès le départ elle ne l’avait pas senti. Il faisait partie de cette catégorie de personnes qui suintait le malsain. Sa mine cireuse, ses lèvres boudinées et salivantes, son petit œil sournois enflé par l’alcool, n’inspiraient à Emma qu’une intense répulsion. Il venait de débarquer à Paris et ne savait pas où coucher. Il l’avait invité à prendre un verre, l’autre lui avait renvoyé l’ascenseur et de verres en verres, ils s’étaient construits une belle amitié transparente. Elle n’avait pas eu droit au chapitre. L’ivresse s’emparait d’eux tandis qu’une nuit claire tamisée d’étoiles s’immisçait sur la capitale. Ils continuaient de boire tandis que les bonnes gens étaient rentrés chez eux et regardaient sans doute la télévision. Les voix s’emportaient, la moiteur irradiait son arôme âcre, le comptoir était cerné de mégots. Emma s’ennuyait mais n’en laissait rien paraître. Il se passionnait pour des sujets sans grande importance tenant le coup face au Breton qui ricanait en regardant le sol. Le barman étudiait de loin le niveau des consommations. L’air était étouffant et leurs rictus étaient déplorables quand Il invita le Breton à boire un dernier verre à la maison, un Cognac Napoléon. Emma s’angoissa immédiatement à cette idée, mais l’autre accepta avec joie. Ils remontèrent le boulevard. Les réverbères s’arquaient sur leur chemin. Les rues tentaculaires semblaient garder un secret. Ils habitaient à proximité, aussi arrivèrent-ils rapidement dans l’appartement encore en travaux. Le Breton récupéra des coussins qu’il plaça contre un mur et s’y avachit. Il retourna une caisse devant lui qui se transforma en table basse en pin du Chili. La bouteille arriva avant les gobelets en plastique. Qu’à cela ne tienne ! Ils se mirent à boire au goulot.

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